Construire grâce au BIM des habitations pour vivre sur Mars… Voilà qui fait rêver alors qu’il y a encore quelques jours l’astromobile Perseverance se posait sur la planète rouge.
Si vous êtes de ma génération, vous devez penser comme Elon Musk qu’on nous a volé la conquête de l’espace. Nos parents ont assisté à l’alunissage d’Apollo 11 quand nous pensions vivre le premier pas foulé par l’homme sur Mars.
Que l’on rêvait d’être architecte ou pas dans notre enfance, on a tous imaginé comment on pourrait vivre dans l’espace. Des capsules de verres ovoïdes reliés par des tunnels de verre ressemblant à la Maison Bulles de Pierre Cardin. La création d’une atmosphère artificielle permettant de reproduire l’habitat terrestre. Le cinéma a apporté également sont lots de solutions.
Divers projets se concrétisent depuis que la conquête spatiale bénéficie de nouveaux programmes financés par certaines puissances mondiales. La conquête de l’univers est un défi qui concerne également les architectes en quête d’imaginer des habitations conviviales.
La mise en place de systèmes complexes qui doivent cohabiter sera possible grâce au Building Information Modeling (BIM). Cette technologie permettra d’améliorer la faisabilité des concepts en apportant des solutions efficientes. Toutefois, c’est surtout dans la maintenance de l’écosystème d’habitations qu’il sera le plus utile.
L’anticipation des matériaux à prévoir et des modifications à effectuer aura une valeur vitale pour l’humanité. L’architecte et la chaine de construction devront avoir des outils permettant d’envisager tous types de scénarii.
Comment construire des habitations sur Mars ?
Les projets rendant possible la vie sur Mars ou sur la lune abondent depuis plusieurs années. On trouve dans la conquête du foncier extra-terrien les milliardaires propriétaires de Space X ou d’Amazon. Mais d’autres idées émergent aussi en parallèle pour créer une vie agréable en dehors de la Terre.
Arnaud North, le responsable de la filière BIM chez Cadschool, avait conçu un projet lors de ses études à Houston sur l’habitat sur Mars. À cette époque, on dessinait encore les plans sur des feuilles de papier avec une règle et un crayon. En partenariat avec la NASA, il avait alors élaboré des capsules pouvant résister aux vents extraordinaires qui sévissent sur la planète rouge.
Le transport des marchandises constitue l’une des contraintes majeures quand on veut construire sur Mars. Pour optimiser l’envoi d’une capsule spatiale, on doit profiter d’une période où la Terre et Mars sont très proches. Un vol aller prendra à ce moment-là quatre mois. Si on veut revenir sur notre planète assez rapidement, il faut rester très peu de temps sur le sol martien. Cela implique de concevoir des systèmes de construction efficients. À l’heure actuelle, l’envoi de matériel dans l’orbite basse terrestre est de 4’000.- $ par kilo. Envoyer du matériel est donc tout simplement inenvisageable.
La première idée est d’envoyer des modules avec des imprimantes 3D pouvant construire les outils et les matériaux nécessaires à la construction des premiers logements destinés aux équipes scientifiques. Une fois sur place, il faudra développer des pôles d’habitations confortables qui recevront toujours plus de monde. Il faut imaginer qu’on devra créer, dans un premier temps, des zones d’exploration vivables qui seront essentiellement des pôles d’études.
Plusieurs idées ont émergé en se basant sur l’environnement déjà présent sur Mars. L’avantage de partir d’une feuille blanche est la possibilité de nous inspirer de ce qui a été fait pendant des siècles sur Terre. Reproduire les mêmes erreurs environnementales est à éviter absolument. L’utilisation intelligente des ressources présentes est plus que primordiale. Mars détient des stocks de rigolithe qui, une fois compressé en briques, a une résistance défiant les meilleurs bétons armés actuels. L’utilisation du basalte est également envisagée pour créer des éléments sortis d’imprimantes en trois dimensions.
Un des axes de réflexion est d’utiliser les cavités présentes sur Mars. Plus profondes que celles se trouvant sur notre planète, elles permettraient de se protéger des éléments hostiles présents sur Mars. La température en moyenne assez proche de nos zones arctiques, les radiations cosmiques sont terriblement néfastes et l’atmosphère est composée d’un mélange de gaz différent de la nôtre.
Mais le projet le plus ambitieux serait de créer une ville autonome. Les déplacements pourront se faire sans sortir de la zone sécurisée. On pourra ainsi éviter d’être confronté à des déplacements en zone non hermétique et muni de protection spatiale. Le défi de l’architecte sera de construire des zones externes dans l’interne. Car au final il faut recréer des zones sociales et avec un écosystème végétal identique ou assez proche du sol terrien.
Le BIM apporte une solution viable à la construction martienne
Le BIM permet de pouvoir calculer le nombre d’heures qu’il faudra pour effectuer une tâche, à quel moment il faudra renouveler le matériel ou encore quelles seraient les synergies à mettre en place pour cumuler extraction de la matière première et construction.
L’édification de bâtiments sur Mars devra être optimisée au maximum pour économiser les ressources, autant humaines que matérielles. Le calcul des besoins sera optimisé grâce au BIM. En intégrant un maximum de données, on pourra obtenir une méthode de construction à ce nouvel environnement. Cela apportera un gain de temps précieux et financier non négligeable.
Il faut penser que les premières constructions devront être réalisées par des robots avant que la main d’œuvre humaine puisse prendre le relais. La compilation de l’information dans la maquette numérique permettra à différentes équipes de construction et de maintenance de pouvoir établir le bon diagnostic.
Les conditions de vie martienne améliorées grâce au BIM
Une des problématiques que va résoudre la technologie BIM est la gestion de la vie martienne. La notion de smart city prend tout son sens dans un écosystème qui devra interagir avec plusieurs sources. Comme dans la station internationale ou une fusée, la ville devra avoir plusieurs sas de sécurité. Cependant, la problématique d’une ville sera la gestion des déplacements de ses habitants. Le BIM permettra aux différents bâtiments de réagir entre eux pour économiser la ressource disponible. La gestion des flux de personnes est une question vitale dans un monde construit qui doit s’autoréguler et être quasi autosuffisant.
L’environnement contraignant de Mars devra être maitrisé de façon opérationnelle. Le BIM permet d’intégrer une multitude de données dont celles environnementales. Grâce à la communication entre les différentes sources de données, on pourra anticiper la transformation de la ville. On pourra, par exemple, calculer à quel moment les tempêtes cosmiques séviront et ainsi déployer les protections nécessaires. Cela implique, entre autres, d’anticiper les stocks d’énergies à utiliser dans une situation où l’écosystème aura besoin de ressources supplémentaires.
Au final, la maquette numérique deviendra le cerveau de l’habitat martien. Il coordonnera toutes les actions nécessaires au maintien de la vie. Cela semble encore utopiste mais de telles réflexions nous amènent aussi à réfléchir sur notre habitat terrestre. Chaque architecte a la mission de penser à concevoir des habitations qui s’intègrent au mieux avec le vivant.
Le projet Arkadia crée grâce au BIM
Sept passionnés d’espace, d’architecture et du BIM ont répondu à l’appel à projets d’une construction de ville martienne. Le concours a été lancé par la Mars Society, active dans plusieurs pays. L’association réunit des professionnels de tous domaines qui explorent des solutions viables pour l’installation d’êtres humains sur la planète rouge.
Le projet Arkadia est basé sur plusieurs quartiers pouvant au total permettre la cohabitation de 10’000 personnes. L’idée de départ est d’utiliser les ressources présentes sur Mars dans un cycle écoresponsable. Chaque quartier étant autonome mais interdépendant. Ainsi, si un problème survient, le pôle d’activité peut être isolé et les autres départements peuvent venir en aide à la communauté.
Chaque quartier sera régulé pour concentrer lieux de vie, de travail et d’activité sociale. Cela permettra de limiter les déplacements et de consommer ce que l’on produit. Les premiers colons, hors mission scientifique et de création de l’habitat, seront composés de botanistes et agriculteurs.
Les déplacements entre les quartiers seront assurés par des véhicules électriques et l’alimentation en énergie se fera par des stations solaires. Les bâtiments hermétiquement pressurisés seront en construit dans une double architecture : la première étant protectrice et la seconde abritant les lieux de vie.
Au final quatre zones seront créées dans un ensemble :
Zone d’habitation
Zone de production agricole
Zone commune : restaurant, musée, jardin botanique, etc.
Zone industrielle : usine, centrale photovoltaïque, spatioport, etc.
Les concepteurs d’Arkadia ont commencé à dessiner à la main avant d’utiliser les outils numériques. Il fallait dans un premier temps laisser libre cours à leur imagination car ils partaient tous d’une feuille blanche. Puis la modélisation 3D a pris place pour continuer et finir sur le BIM.
Afin de conceptualiser et mettre sur plan cette ville martienne, l’équipe a utilisé le logiciel Revit pour la modélisation ainsi que ReCap et Dynamo pour la génération de terrains. Les rendus 3D ont été réalisés avec Twinmotion grâce au terrain martien modélisé à partir des données de la NASA et de Google Earth agrégées dans ReCap.
La formation à cette technologie est une musique d’avenir. Il faut commencer à s’initier au BIM dès que possible.